Question de Madame Michu de Verrey-sous-Salmaise : « cette année, pour la Noël, j’aimerais trouver quelqu’un qui aide ma grand-mère et mon père à écrire leur biographie, mais je suis échaudée. Les Smartbox des années passées dorment dans le tiroir de la commode. Offrir une biographie, est-ce bien raisonnable ? ». Et bien, Madame Michu, oui et non.
Mais d’abord, il est temps peut-être que je vous dise quelques mots de la biographie sur laquelle je travaille depuis septembre. Avec Marie-Hélène, nous échangeons deux fois par mois. Nous voyageons beaucoup : dans le Nord, en Outre-mer, dans le temps. Nous parlons du concert de Pink Floyd à Versailles (je suis très jaloux), d’enfants qui courent partout, des mauvaises surprises de la vie aussi. Nous sommes plutôt efficaces. Le découpage imaginé au départ fonctionne. Lors de nos entretiens, ma dernière question arrive toujours à la cinquante-neuvième minute. Elle est étonnée par la fluidité des échanges, satisfaite des restitutions que je lui propose. Alléluia ! La biographie, sur le papier, c’est moins chic que l’iPhone 100, mais c’est pas mal quand même.
À Noël, on cherche à faire plaisir (normalement)
D’où cette idée proposée la semaine dernière par l’association Biographicus (à laquelle j’appartiens) : offrir une biographie à ses proches pour Noël. Oui, me direz-vous, mais que faîtes-vous de la question de Madame Michu. Est-ce raisonnable ? J’y viens. Comme j’ai un côté jésuite, permettez-moi de lui répondre par une autre question. À qui cette biographie ferait-elle plaisir : à vous, Madame Michu ou à celui à qui vous la destinez ? Si la réponse est « les deux », let’s go parce que dans la vie, il ne faut pas traîner. Je me souviens d’une connaissance qui m’a contacté quand j’ai lancé mon activité de biographe, regrettant que je ne l’aie pas fait avant. Ses grands-parents n’étaient plus de ce monde. C’était trop tard pour lui.
Personnellement, j’adorerais que mes ancêtres aient écrit leur biographie. J’aimerais avoir des détails sur ce jour de 1905 où mon arrière-grand-père s’est barricadé dans l’église du village, refusant que les représentants de l’État fasse l’inventaire des biens qui s’y trouvaient. J’aimerais connaître les circonstances exactes dans lesquelles il a acheté ce qui est devenu une maison de famille… Mais j’ai conscience que certains se foutent éperdument du passé (genre Édith Piaf pour qui les souvenirs ne sont qu’un vulgaire allume-feu). Vient donc l’heure des bémols. Attention au cadeau empoisonné. Tout le monde n’a pas envie de se confier. On ne décrète pas qu’un parent va écrire sa biographie. Biographicus, ta proposition est légitime, mais Madame Michu, vos doutes le sont aussi.
Plusieurs formes de biographie
Reste qu’il y a biographie et biographie. À défaut de commencer une histoire au berceau et d’arpenter le moindre recoin d’existence, on peut se focaliser sur quelques événements de vie plus faciles à raconter : souvenirs de vacances, de cuisine, d’école, de quelques figures emblématiques de la famille… Ma conclusion donc : vous pouvez offrir une biographie avec un grand B à votre père ou à votre grand-mère, mais seulement si vous en avez déjà parlé. Si ce n’est pas le cas, limitez-vous à un recueil de quelques souvenirs. Et si vraiment ils se prennent au jeu, rien n’empêchera ensuite de continuer.
