La femme de chambre

Pff. Je vous ai promis une lettre sur la mémoire et me voilà avec un nouveau conseil podcast : Shame on you. Si mes calculs sont bons, je devrais retomber sur mes pieds dans quelques lignes. Patience.

Qui se souvient de Nafissatou Diallo, l’héroïne malheureuse de l’histoire du quatrième petit cochon ? Celui qui a construit sa maison en avocats blindés pour détourner la tempête médiatique sur sa victime, semer le doute dans les esprits et s’en sortir sans trop de dommages. Dans leur podcast, Shame on you, les journalistes Marine Pradel et Anne-Cécile Genre reviennent sur une affaire dont personne ne sort grandi. Ni Nouf-Nouf, ni les journalistes, ni le Français moyen que tu es toi aussi, lecteur.

Shame on you
Nous étions jeunes. Nous étions beaux. Nous étions crédules. Le mouvement Me too n’était pas sorti de terre. Avoue que, comme moi, tu as voulu croire, un court instant au moins, qu’il y avait méprise. Peut-être même « un plan d’envergure afin de faire chanter un homme politique de renommé mondial », dixit Nafissatou Diallo elle-même.

Condescendance

Car oui, la « femme de chambre qui [a] empêché DSK de devenir le président de la France » (c’est toujours elle qui parle) s’est confiée, il y a quelques années, dans une autobiographie publiée dans l’indifférence générale et dont ce podcast offre des extraits dans son épisode 7. C’est ce chapitre que je vous conseille d’écouter. Et, plus précisément encore, la deuxième partie de l’épisode. Après le laïus d’un journaliste de Paris-match dont on se passerait bien (le laïus ou Paris-match ou les deux, je vous laisse décider), l’histoire de Nafissatou Diallo nous met un gros taquet derrière le crâne.

Dans un premier temps pourtant, ce passage m’a presque agacé. Je me suis dit qu’on perdait le fil de l’enquête ; que pour juger un homme, peu importait la personnalité de sa victime. Puis d’une hutte en terre au mariage forcé, d’une excision à la perte d’un enfant, je me suis vraiment intéressé à elle. J’ai compris que les deux journalistes avaient raison de lui rendre son humanité. À la fois singulière et symptomatique d’un monde qui ne tourne pas rond, son histoire ne change rien à ce qui s’est passé dans la suite 2806. Elle interroge en revanche notre condescendance à tous. Les uns ont fait de Nafissatou Diallo l’arme d’un complot. Les autres un outil politique pour dénoncer un système. Mais au fond, qui l’a regardée dans les yeux pour lui demandé comment ça allait ?

(Si ce podcast ne vous fait pas la semaine, n’oubliez pas La mallette verte)

L'heure de la prose

Olivier Descamps Journaliste, Plume, Biographe

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