80 ans, et alors ?

Ça compte l’apparence. On aimerait en faire abstraction pour juger les gens qu’on rencontre, mais on n’y arrive pas. C’est moins vrai avec les seniors. « Une bonne bouille ronde de pépé, ça peut tromper son monde », écrit Sandrine Colette*. Quand on y pense, c’est aussi bien comme ça mais l’effet collatéral, c’est qu’on a vite fait d’en conclure qu’un ancien est doux et lisse. Comme le nappage d’un gâteau au chocolat qui masquerait des goûts puissants cachés à l’intérieur (métaphores pourries, +10 points). 80 ans, et alors ?

On sait que David Gilmour (78 ans), Keith Richards (80), Paul MacCartney (81) ont eu des vies riches et bien plus rock’n’roll que les nôtres. Pourquoi l’oublie-t-on dès qu’on croise dans la rue un double-quadra. Il y a de quoi se vexer. Plus jeune que ces gars là, Laure Adler a mis un coup de pied il y a deux ans dans le cocotier avec son manifeste. « Je suis vieille, et je vous emmerde », lançait-elle.

80 ans, et alors ?

Dans un récent épisode des Pieds sur terre – le Graal radiophonique pour ceux qui ne connaissent pas – trois femmes enfoncent le clou. Rappelant qu’il faut arrêter avec les « elle n’a pas froid, la petite dame ? ». On a le droit de la trouver touchante ou insupportable la petite dame. On n’a pas le droit de ne pas les considérer du tout ou de l’assimiler à une enfant.

Derrière les visages doux et lisses se cachent parfois des caractères bien trempés et des histoires hautes en couleur. L’émission en présente trois, à commencer par Christine qui malgré ses 78 printemps est libre comme l’air. L’ancienne danseuse du Crasy horse (l’histoire ne dit pas si se elle a été copine avec la Dame qui chante) a le sentiment d’avoir toujours vingt ans, mais « n’aimerait pas les avoir aujourd’hui ». Elle parle d’elle avec beaucoup d’autodérision. Traîner dans une boutique, « ce n’est pas de l’habillage, c’est du camouflage » !

Madeleine, elle, déteste la condescendance, évoque ses souvenirs… et son présent. Un coup de foudre à 70 ans, ça ne fait pas rêver ? La suite, à vous de la découvrir.

* En fait, j’ai accolé deux phrases de son roman On était des loups, mais je suis sûr que personne n’ira vérifier, niark niark.

L'heure de la prose

Olivier Descamps Journaliste, Plume, Biographe

Cette publication a un commentaire

  1. Pascale

    Maman va sur ses 85, papa nous a lâchés à 82 à l’insu de son plein gré… et je suis toujours forcée de réfléchir pour donner leur âge. Et de me dire après coup que 80 ce n’est pas si vieux que ça quand je les regardais ou quand je la regarde (surtout que l’on espère atteindre en forme). Merci pour ce petit moment de jeunesse.

Laisser un commentaire