Des petites histoires qui parlent fort

Je ne vais pas vous prendre en traître. Sachez que les conseils qui arrivent vont être frustrants. Il faudra attendre quelques semaines voire quelques mois pour découvrir les podcasts que je vais évoquer. Mais la patience est un arbre dont la racine est amère et les fruits très doux, comme on dit. Quand ils vont sortir ces podcasts, ça va swinguer.

Avec sept autres journalistes, on a créé ces derniers jours le Podcast social club, un collectif qui a le goût des petites histoires qui parlent fort. Et des histoires, on en a un paquet sous la main. Celle de Jean par exemple, 88 ans, qui raconte la « folie à la Ionesco » de sa femme atteinte de la maladie d’Alzheimer et qu’il aide au quotidien (« pourquoi tu l’aides ? », par Noémie Fossey-Sergent). Celle de Natacha aussi, partie en quête de ses origines et qui s’est trouvée sans crier gare une nouvelle famille (Stéphanie Carballo, « ADN que pourra »).
Celle de Julien Domart et de sa bande de passionnés de vinyles enfin. Tiraillés entre le goût qu’ils ont toujours eu pour ce support hors du temps et son retour en grâce qui gâche leur plaisir car il le transforme en un phénomène de mode (« In vinyl veritas »).

Des petites histoires qui parlent fort

Derrière leur singularité, ces petites histoires nous parlent du monde dans lequel nous vivons. Je dois vous concéder quelque chose. En tant que journaliste environnement, je me suis toujours moqué des confrères qui faisaient du témoignage la base de leur travail. Si j’étais amené à enquêter sur la mobilité de demain par exemple, je m’efforçais d’interroger tout un tas de gens pour décrypter les enjeux climatiques, économiques, de santé. Puis je cherchais les avantages qu’il y avait à changer de modèle, les difficultés à surmonter, les cas particuliers à gérer…
Tout en sachant que les arguments de mes interlocuteurs se feraient démonter la tronche par l’article d’un stagiaire de troisième qui se rendrait au café du coin pour recueillir le témoignage d’un Jean-Pierre convaincu qu’avec les 150 km qu’il doit faire en voiture le matin et le soir pour aller chercher le pain, l’urgence est d’abord de supprimer les taxes sur le diesel. Le reste, on verra plus tard.

Le temps, allié de l’intelligence

Avec le podcast, je rentre dans le rang. Ok stagiaire, t’as gagné. Je vais faire comme toi. Mais grâce au maître, Martin Quenehen, j’ai appris à utiliser le témoignage intelligemment, en prenant le temps de chercher les bonnes personnes. Surtout en les laissant s’exprimer longuement. Le temps est le meilleur allié de l’intelligence (on va dire que c’est un proverbe bouddhiste, mais n’allez pas vérifier svp). Tu ne nous auras plus avec ta punchline sur le diesel JP. Tu nous racontes ton histoire en profondeur et tu nous laisses juger.

Pour autant, certaines réflexions finiront bien sûr par s’imposer d’elles-mêmes. Après avoir entendu la détresse de Fabrice, interrogé par Chloé Rébillard dans « Toi, toi mon toit », vous vous y reprendrez à deux fois avant de vous acheter une petite résidence secondaire de rien du tout ou de louer un Airbnb. À Biarritz, il n’y a plus que six ou sept personnes qui vivent dans son immeuble de trente appartements. Et lui sera bientôt expulsé. Dommage parce qu’il a toujours payé son loyer et que ça le met dans une mouise absolue. Mais il comprend. Il ne juge pas.

Déborah va bien vous remuer aussi dans « T’es pas ma mère », d’Alexandra Luthereau, un podcast sur la difficulté des femmes à trouver leur place quand elles s’installent avec un mec qui a déjà des enfants. Enfin, à l’heure où un paquet de Français se disent que finalement, c’était pas si mal le fascisme, les parcours de la cheffe Alessandra Montagne Gomes ou du musicien Lucas Santtana (« Tudo Bem La France », de Bertrand Edel) apportent un autre regard sur les étrangers qui arrivent dans notre beau pays avec les yeux qui pétillent et contribuent largement à le magnifier quand on les laisse exprimer leur singularité.

PS : Mes podcasts à moi, j’en parlerai plus tard. Mais si quelqu’un veut un récit familial en podcast, il sait où j’habite.

L'heure de la prose

Olivier Descamps Journaliste, Plume, Biographe

Laisser un commentaire